le résumé
La preuve médicale en est faite : chez les personnes vivant avec le VIH et dont la charge virale est indétectable grâce à leurs traitements antirétroviraux, le risque de transmission du VIH est quasi nul — surtout s’il y a usage du condom. Dans ce contexte, doit-on divulguer notre séropositivité à notre partenaire sexuel ?
les détails
On ne peut répondre par un oui ou par un non. La question de la divulgation comporte plusieurs ramifications, notamment aux plans de la loi, de la prévention, de la protection de la vie privée et de la stigmatisation.
L’état du droit canadien
Au Canada, les PVVIH ont l’obligation de dévoiler leur séropositivité à leur (s) partenaire (s) sexuel (s) lorsqu’il existe une « possibilité réaliste de transmission du VIH ». C’est ce qu’a statué la Cour suprême dans l’arrêt R c. Mabior, où il a été décidé que le fait d’utiliser un condom et d’avoir une charge virale faible ou indétectable écartait cette « possibilité réaliste ». A contrario, on pourrait conclure que la combinaison condom + charge virale faible ou indétectable équivaut à l’absence de l’obligation de divulgation. Ce n’est toutefois pas si simple, car il n’était question, dans cette décision jurisprudentielle, que de relations vaginales. Mais on peut déduire qu’il en est de même pour les relations anales ou orales.
Des experts scientifiques à l’appui de la décriminalisation de la non-divulgation
Le Réseau juridique canadien VIH/sida réagissait l’année dernière à la sortie publique de Charlie Sheen en publiant un article précisant les défis rencontrés au Canada quant à la décriminalisation de la non-divulgation du VIH. Dans le but d’apporter un éclairage sur la définition de ce qu’est une « possibilité réaliste de transmission », des experts scientifiques canadiens chevronnés ont publié un énoncé de consensus qui décrit précisément les probabilités de transmission du virus dans diverses situations, ceci en vue de réduire le nombre des accusations criminelles.
Ce n’est pas un dilemme moral
Preuve scientifique à l’appui, donc, si la charge virale est indétectable et que le condom est utilisé, il n’y a pas d’« obligation morale » à divulguer sa séropositivité à un éventuel partenaire sexuel, car les risques de transmission sont quasi nuls. Ce qui demeure contradictoire, c’est qu’advenant une situation problématique — par exemple un partenaire l’apprend a posteriori et réagit avec crainte ou colère, même injustifiées, même en cas d’absence de transmission, et même s’il ou elle n’a pas posé la question auparavant — la personne séropositive pourrait avoir à se défendre contre certaines accusations et prouver que le risque de transmission était écarté de manière « réaliste », et ce, malgré le fait que le port du condom et l’acte de s’informer ne devrait pas être l’unique responsabilité des personnes séropositives, mais bien celle de tous.
La divulgation : une protection pour soi-même
Selon Tyler Curry, blogueur sur HivEqual, mieux vaut dévoiler sa séropositivité, non seulement pour des raisons légales (certains États américains exigent la divulgation en tout temps), mais aussi parce que la divulgation constitue en quelque sorte une manière de se protéger soi-même, une façon de découvrir la personne avec qui on s’apprête à avoir une relation sexuelle et d’éviter d’éventuels problèmes en cas de réactions négatives. Notez que si le statut est divulgué sur un site de rencontres en ligne, la divulgation sera documentée et protégera sur le plan légal.
La stigmatisation : un obstacle à la divulgation (et au dépistage)
Les PVVIH subissant encore, bien malheureusement, stigmatisation et discrimination dans différents contextes, certaines hésitent à divulguer leur état à leur partenaire sexuel, même si les risques de transmission sont inexistants, craignant d’être victimes de rejet ou de violence. Aussi, certaines personnes refusent d’être dépistées, pour les mêmes raisons. Or, on estime que 25 % des PVVIH au Canada ignorent leur statut. La lutte à la stigmatisation fait partie intégrante des stratégies globales de lutte au VIH/sida, et ce, de manière concertée partout dans le monde.
les conseils du pharmacien
Dévoiler que l’on vient de recevoir un diagnostic de séropositivité au VIH n’est pas chose facile. C’est un virus qui suscite encore la peur chez ceux et celles qui ne sont pas bien informés. Cependant, le soutien de l’entourage est précieux, voire essentiel, pour apprendre à bien vivre avec cette nouvelle réalité. Il revient à chacun d’assurer le maintien d’un équilibre entre la protection de sa vie privée et le fait de divulguer sa séropositivité. Le meilleur conseil ici serait de bien choisir à qui le dire, et de bien se préparer.
Quand il est question de la divulgation aux partenaires sexuels, la décision est aussi personnelle, mais elle est assortie d’une responsabilité : le suivi rigoureux des traitements et l’usage du condom. Par contre, divulguer peut éviter des ennuis d’ordre juridique ou autres, même si l’imputabilité de la PVVIH n’est pas « réalistement » engagée.
En tout temps, vous pouvez en parler avec votre pharmacien, qui saura mieux vous informer et vous guider vers les ressources adéquates à ce sujet.
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